1950 €
80 x 80 cm
Peinture acrylique et aérosol sur toile
Cette toile, saturée de bleus profonds, ne se contente pas d’évoquer une surface picturale : elle agit comme un espace liminal où se croisent le visible et l’invisible. La matière éclaboussée, apparemment chaotique, convoque ce que Jung nommait les archétypes de l’inconscient collectif : la nuit, l’océan, l’infini. Chaque goutte, déposée dans une multiplicité foisonnante, devient la trace d’un geste premier, presque dionysiaque, où l’ordre rationnel cède la place à la pulsion créatrice brute.
Le bleu, couleur de l’immatériel, s’offre ici dans une intensité quasi mystique. Il se fait voile et abîme, à la fois velours rassurant et gouffre abyssal. On retrouve l’intuition d’Yves Klein : le bleu comme vecteur d’immensité, comme ouverture vers le vide. Mais contrairement au monochrome lisse, l’éclatement de la couleur en myriades de particules inscrit l’infini dans la fragmentation — rappelant que l’unité métaphysique ne se saisit qu’à travers la dispersion des phénomènes.
À la manière de Pollock, le geste s’abolit dans la prolifération : il n’y a plus de centre, plus de hiérarchie, seulement un champ total, où chaque trace possède la même valeur ontologique. Le regardeur, perdu dans cette densité vibrante, expérimente ce que Merleau-Ponty nommait le chiasme du visible et du sensible : voir, c’est aussi se sentir vu, absorbé par le tableau.
Ainsi, Blue Velvet interroge la frontière entre l’apparaître et le disparaître, entre la douceur enveloppante du tissu et la violence du gouffre qu’il recouvre. C’est une méditation sur l’ambivalence de l’humain : le désir d’absolu et la peur du chaos, la quête d’unité et l’expérience de la fragmentation.